Fonction HR, sans dessus dessous avec l’IA
Recrutement, formation, rémunération… L’IA va transformer la fonction HR. Avec des gains importants à la clé. Explications d’Aimé Lachapelle, d’Emerton Data.
30 à 40 % de productivité en plus. C’est ce que la fonction HR devrait gagner grâce à l’IA générative, selon Emerton Data. Son étude -qualifiée d’ampleur- s’est étirée sur deux mois auprès de 40 experts HR européens de secteurs variés et d’entreprises allant des scale-up « tech » aux grands groupes internationaux. Les entretiens réalisés ont permis d’associer aux principales activités HR 21 cas d’usage d’IA qui transformeront les différents métiers et processus HR.
L’impact des 21 cas d’usages identifiés sur la fonction HR est de trois ordres : faire les choses plus vite (50 – 60 % des cas d’usage, faire les choses mieux (20 – 30 %) et faire de nouvelles choses (10 – 20 %).
« Dans l’ensemble, nous pouvons nous attendre à une optimisation de la productivité de l’ordre de 30 à 40 %, avec des gains significatifs principalement dans l’acquisition de talents, l’administration et la conformité, notamment grâce à l’automatisation des tâches HR courantes telles que les réponses aux requêtes administratives et l’identification de candidats, commente Aimé Lachapelle, Managing Partner, Emerton Data. Les autres activités bénéficieront d’une amélioration significative grâce à des données plus qualitatives, renforçant ainsi la compréhension organisationnelle. »
Travailler plus vite, mieux et autrement
Dans le cadre de la planification stratégique et de la conception organisationnelle, l’IA permettra, par exemple, d’automatiser la veille sur le marché du travail, en suivant en temps réel les évolutions des politiques de recrutement et de rémunération des différents acteurs, notamment des concurrents. « L’entreprise pourra ainsi ajuster sa propre politique de recrutement au plus près des conditions du marché. »
Sur l’activité de gestion administrative et de conformité, un exemple de cas d’usage est le développement d’un chatbot RH destiné à la récupération d’informations administratives et à l’auto-classification de tous les documents HR, faisant gagner un temps considérable aux responsables administratifs.
Concernant la gestion de la rémunération et des avantages sociaux, une application de l’IA est le positionnement automatisé des candidats dans la grille de rémunération interne en fonction des informations extraites du CV et des retours d’entretiens.
Transformation et conduite du changement
Dans le cadre de l’acquisition de talent, le sourcing de candidat est un processus extrêmement chronophage et coûteux. L’IA permettra de gagner un temps précieux en automatisant la recherche de candidats et d‘aider la présélection des CV. « Au-delà du gain de temps indéniable, ce cas d’usage a le potentiel d’améliorer en plus les performances, la cohérence et la diversité du recrutement. »
Pour la gestion de la performance, l’IA permettra de détecter en un coup d’œil les sujets de surperformances ou de sous-performance au sein des équipes. Dans le contexte de l’évaluation des performances, on peut citer le cas d’un assistant aidant les managers à rédiger leur feedback.
Enfin, l’analyse des données liées à la performance et à la gestion des talents valorise les compétences de conseil, c’est-à-dire la capacité à orienter les parcours individuels au sein de l’entreprise. Ceci est particulièrement vrai pour les HR business partners, les responsables rémunération et avantages sociaux, et les responsables de projets. Parce que l’IA bouleverse les rôles et les compétences des collaborateurs HR, il est nécessaire d’établir un programme robuste de transformation et de conduite du changement.
A la lumière de l’AI Act
« L’IA ne fera pas disparaître la fonction HR, mais permettra à coup sûr sa montée en puissance et de l’inscrire comme un partenaire incontournable de la stratégie des entreprises », estime Aimé Lachapelle. Toutefois, cette perspective est à nuancer au regard du contexte de la régulation européenne sur l’IA. L’AI Act introduit en effet une approche basée sur le risque pour l’utilisation de l’IA, en distinguant plusieurs catégories d’applications en fonction de leur niveau de risque potentiel pour les individus et la société. Au même titre que la biométrie, les infrastructures critiques, l’éducation, l’accès aux services publics et privés essentiels, la justice et la gestion des migrations, les applications de l’IA en matière d’emploi sont identifiées comme étant très sensibles.
« Les cas d’usage relatifs au recrutement, à la gestion des performances et la formation des employés pourraient ainsi être considérées comme des systèmes à haut risque en raison de leur impact potentiel sur les droits fondamentaux et la prise de décision relative à l’emploi », prévient encore Aimé Lachapelle.