Data centers : tendance nette à l’off premise
L’off premise s’impose. L’Uptime Institute parle d’un basculement historique. Les data centers d’entreprises disparaitront-ils ? Max Smolaks, Research Analyst, répond.
« Pour la première fois que la proportion des charges de travail informatiques hébergées dans des centres de données sur site représente désormais un peu moins de la moitié de l’empreinte totale de l’entreprise. L’off premise l’emporte. Il s’agit d’un moment important et attendu depuis longtemps pour l’industrie », estime Max Smolaks, Research Analyst, Uptime Institute.
Même si l’importance des data centers demeure, leur importance en tant que partie intégrante de l’infrastructure numérique d’une entreprise semble s’estomper. Aujourd’hui, en effet, les entreprises n’ont jamais disposé d’autant d’options pour savoir où héberger leurs charges de travail. La colocation, les sites périphériques, l’infrastructure de cloud public et le SaaS offrent tous une alternative mature pour prendre en charge de nombreuses charges de travail d’entreprise, sinon la totalité.
« Cela ne signifie pas que la capacité, l’utilisation ou les dépenses des data centers diminuent en termes absolus. En revanche, note Max Smolaks, cela indique que pour les nouvelles charges de travail, les organisations ont tendance à choisir des centres et des services tiers. »
De la capacité sans aucune dépense d’investissement
La tendance est là. La part des charges de travail dans les installations des entreprises est susceptible de continuer à baisser. Les organisations se tournent vers des sites tiers comme modèle de déploiement préféré pour leurs applications – chacun avec ses propres avantages et inconvénients, mais tous offrant de la capacité sans aucune dépense d’investissement.
Dans l’enquête annuelle 2020 d’Uptime sur les centres de données, les personnes interrogées avaient indiqué que, en moyenne, 58 % des charges de travail IT de leur organisation étaient hébergées dans des data centers d’entreprise. En 2023, ce pourcentage est tombé à 48 %. « Dans cette étude, la dernière en date, les personnes interrogées prévoient que seulement 43 % des charges de travail seraient hébergées dans des centres de données d’entreprise en 2025… »
Pour Max Smolaks, le contexte économique explique la tendance. « De plus en plus, les difficultés économiques pèsent sur les installations des entreprises. Celles-ci cherchent à se décharger du fardeau financier. Egalement de la complexité organisationnelle liés à la création et à la gestion de la capacité des data centers. »
Par ailleurs, les data centers tiers spécialisés sont généralement plus efficaces que leurs homologues on premise. Les plus grandes installations de cloud et de colocation bénéficient d’économies d’échelle lors de l’achat d’équipements mécaniques et électriques. Ce qui les aide à réduire leurs coûts. Pour certaines applications, les petites installations tierces sont plus attractives. Elles permettent aux organisations de rapprocher les services sensibles à la latence ou à haute disponibilité des sites industriels ou commerciaux.
Off premise, des avantages à différents niveaux
Max Smolaks relève les principaux avantages de l’off premise. Le premier, le plus évident, tient à la gestion des capacités et du changement. « L’externalisation libère les équipes d’entreprise de la lourde tâche consistant à trouver l’espace et la puissance nécessaires pour étendre leur parc informatique. » C’est aussi une façon de répondre à la grave pénurie de personnel. « Lors de l’externalisation, cela devient le problème de quelqu’un d’autre. »
Nouveau critère, le reporting environnemental. L’externalisation simplifie le processus de conformité aux réglementations actuelles et à venir en matière de développement durable. Logique : elle fait peser une grande partie de la charge sur le prestataire de services. Max Smolaks place au même niveau les exigences réglementaires supplémentaires à venir. On peut notamment penser à la refonte de la directive européenne sur l’efficacité énergétique.
Enfin, l’externalisation permet aux entreprises d’expérimenter du matériel IT de pointe. Nul besoin, en effet, d’effectuer d’importants investissements initiaux. Songeons, ici, à des clusters denses nécessitant un refroidissement liquide.
Les promesses du cloud public
Dans l’analyse de Max Smolaks, le cloud public offre un autre ensemble d’avantages par rapport aux centres de données internes. En plus des modèles de tarification flexibles par paiement à l’utilisation, les clients peuvent ajuster leurs coûts en optant pour des instances à la demande, réservées ou ponctuelles. « Il n’est pas surprenant que le cloud public représente aujourd’hui une part croissante des charges de travail IT. En l’espace de trois ans, elle est passé de 8 à 12 % ! »
Toutefois, cela ne signifie pas que le cloud public convient parfaitement à chaque charge de travail, en particulier si l’application n’est pas réorganisée pour tirer parti des avantages techniques et économiques offerts par une plateforme cloud. L’un des problèmes soulignés par l’Uptime Institute Intelligence est le manque de visibilité sur les plateformes des fournisseurs de cloud. « Cela empêche les clients d’évaluer leur résilience opérationnelle ou de mieux comprendre les vulnérabilités potentielles. »
Oui, mais… des coûts parfois exorbitants
Les déploiements de cloud public ont également tendance à générer des coûts exorbitants. Enfin, la concurrence intense entre les fournisseurs de cloud et leurs piles logicielles propriétaires rend les stratégies multi-cloud, qui atténuent certains des risques inhérents aux architectures cloud, trop coûteuses et complexes à mettre en œuvre.
Dans des cas spécifiques, les fournisseurs de services cloud bénéficient d’un avantage oligopolistique pour accéder aux dernières technologies. Ainsi, Microsoft, Baidu, Google et Tencent ont récemment dépensé des milliards pour acquérir un très grand nombre de GPU afin de créer des clusters de formation spécialisés en IA, épuisant ainsi la chaîne d’approvisionnement et provoquant des pénuries de GPU.
« À court terme, prévient encore Max Smolaks, de nombreuses entreprises qui choisissent de développer leurs propres modèles d’IA ne pourront tout simplement pas acheter les GPU dont elles ont besoin et seront obligées de les louer auprès de fournisseurs de cloud… »